8ème partie : le Ganesh Himal (15/10 au 21/10)

52 Camp du pont (2230) ; 7h30 ; +2100 -750

53 Lapagaon (1800) ; 5h30 ; +1000 -1430

54 Tipling gompa (2080) ; 6h10 ; +1400 -1120

55 Somdang (3200) ; 6h30 ; +1750 -630

56 Gatlang (2220) ; 4h20 ; +400 -1380

57 Syabrubensi (1450) ; 3h ; +200 -970

58 Syabrubensi ; REPOS

 

 

 

Voilà 52 jours que nous marchons (15 octobre) :

 

Calfeutrez vos fenêtres et vos portes. 

Laissez couler l'eau du robinet pour que le taux d'humidité ambiante de votre pièce avoisine les 90%. 

Remplissez votre sac à dos jusqu'à ce qu'il pèse 15 kg. 

Enfilez votre paire de chaussures de randonnée préférée. 

Vous êtes prêt. 

 

À votre rythme, montez et descendez 400 fois vos escaliers. Si vous n'y passez pas 2 jours mais plutôt 7 ou 8h (pauses comprises), vous aurez une idée assez proche de ce que nous endurons depuis Besisahar (jour 46). Certes, pas de soleil brûlant votre visage ou un terrain loin d'être aussi stable et régulier que vos marches pour rendre effectivement compte de nos conditions de marche ; mais à votre décharge, l'horizon de votre plafond blanc doit être un tantinet moins motivant que celui d'un paysage himalayen (sans compter que vous ne risquez pas de croiser le sourire inspirant d'une jolie népalaise) ! 

Si la différence d'altitude entre votre rez-de-chaussée et votre 2ème étage est de 3 mètres, vous aurez réalisé une étape de + 1200 m et - 1200 m de dénivelé. Bravo ! Depuis que nous sommes engagés vers l'est au niveau des piémonts himalayens, sur un itinéraire oscillant entre 800 et 4000 m d'altitude, notre quotidien "moyen" ressemble à un parcours du combattant évoluant sur des pentes insensées que seuls les paysans népalais ont pu avoir l'idée (et le courage) d'exploiter et d'arpenter. 

 

Alors, quand un matin ensoleillé nous quittons notre petit lodge de Somdang pour aller passer le dernier col du Ganesh Himal "seulement" 400 m d'altitude plus haut, nous avons l'impression d'une balade jusqu'à la boulangerie au coin de la rue. Au sommet, pas de bonnes viennoiseries, à notre grand damne ; mais en lot de consolation la nature nous offre une vue sublime sur le massif du Langtang.

 

Malgré les difficultés liées à la topographie et à l'orientation (compensées partiellement par les traces GPS du logiciel maps.me), ce trek dans le Ganesh reste un excellent souvenir. L'itinéraire suivi, de Machhakhola à Syabrubensi, revêt à nos yeux la quintessence des vallées himalayennes moyennes, surtout à cette époque de l'année. 


En effet, les forêts menant aux cols commencent à se parer de leurs exquises couleurs automnales, pendant que les cultures en terrasse de millet continuent à embellir les alentours des villages. Lorsque le soleil irradie les panoramas, avec en toile de fond les sommets dressant leurs pics blancs vers le ciel, on en reste scotché ! Nous savourons la chance d'être au cœur de ces tableaux intemporels, semblables aux peintures pittoresques des artistes de Thamel, le quartier touristique de Katmandou. 


L'absence de pistes motorisées enclave les populations d'origine tibéto-birmane de certains villages, d'où le caractère "préservé" de ces derniers. Par "préservé", j'entend qu'il conserve encore de nombreux signes traditionnels (architecture, tenues vestimentaires...) qui émeuvent les trekkers occidentaux comme nous-même, à la recherche d'un idéal himalayen conforme à notre imaginaire. Dans le Ganesh, nous touchons du doigt cet imaginaire d'authenticité, mais prenont aussi conscience des dynamiques en cours dans ces vallées. Une femme originaire du Tipling organise annuellement un trail pour promouvoir l'égalité homme/femme ; Shakira sature les enceintes pendant un match de foot ; des jeunes filles s'expriment en anglais mieux que la plupart de nos collégiens ; etc.

Nos photos ne montrent donc qu'un aspect de la réalité, contrebalancées dans le même temps par nos expériences, qui elles rendent davantage compte des évaluations sociétales. 


Voilà 54 jours que nous marchons (17 octobre) : 


Nous traversons le Ganesh Himal en plein Dashain : 4 jours de célébrations pour le plus grand événement hindou du pays. Pour nous, simples marcheurs de passage, Dashain transforme les villages en boucherie à ciel ouverte (une pensée pour ces buffles et chèvres sacrifiés pour l'occasion et dont les morceaux sont vendus sur les places publiques). Les points d'eau deviennent des lave-vaisselles et des machines à laver pour nettoyer les effusions festives. Les femmes s'habillent de vêtements flamboyants, les jeunes filles colorent leurs lèvres de rouge et les groupes de jeunes impriment une ambiance de kermesse. 


À la suite du passage d'un col à près de 4000 m, nous basculons dans une vallée tamang, aux apparats culturels proches du Tibet. 


Voilà 56 jours que nous marchons (19 octobre) : 


À Gatlang, tenues et visages nous rappellent le voisin tibétain. Dashain, fête hindou, n'est pas célébré ici, mais c'est tout de même l'occasion de vacances offertes par le gouvernement népalais. Ce sera l'occasion pour nous de nous inviter à un mariage bouddhiste, où de manière universelle on mange, on boit et on se pare de beaux vêtements. 


Même en fond de vallée à Syapru Besi (1400 m), l'ambiance reste très bouddhiste, malgré les nouvelles constructions colorées kitsh à l'indienne. Le Bouddha hôtel nous accueille pour un jour de repos.